Périostite tibiale
Le périoste est un tissu qui recouvre la surface de l’os ; il est riche en nerfs et vaisseaux et se confond avec les attaches des muscles sur l’os. Lors de tractions excessives et répétées de ces muscles, une douleur peut survenir directement sur le tibia ou sur les muscles adjacents. Elle se manifeste surtout à froid, et pendant les accélérations et les décélérations, et est ressentie lors de la réception du pied au sol et la propulsion.
Elle a tendance à s’atténuer pendant l’effort, surtout si le coureur maintient une vitesse de course élevée, puisque les appuis au sol sont alors plus légers (temps d’impact moins longs), minimisant les vibrations et les chocs sur les surfaces osseuses. La douleur est en revanche très marquée pendant la phase de récupération active (jogging léger) ou à l’arrêt de l’effort.
Plusieurs facteurs peuvent être à l’origine des périostites:
•augmentation brutale du stress mécanique, notamment en début de saison : augmentation du volume ou de l’intensité des entraînements (distance, durée, fréquence, côtes, sols durs…)
•mauvaise technique de course
•biomécanique de la cheville (en particulier une hyperpronation entraînant un surmenage musculaire)
•utilisation de chaussures inadaptées ou trop usées
•mauvaise hydratation ou alimentation
•une différence de longueur de jambe ou un surpoids sont également à prendre en considération
Une (vraie) périostite tibiale est une fatigue osseuse impliquant une inflammation du périoste. Elle se manifeste par un os douloureux à la palpation sur plusieurs centimètres, en général sur le tiers moyen du tibia et sur sa face interne. Il ne faut pas la négliger car est elle peut évoluer en fracture de fatigue (aussi appelée fracture de stress) qui se traduit par des micro-fractures osseuses. La douleur est alors située à un endroit précis de l’os, en mise en charge (lorsque le poids du corps est supporté). Une telle condition requiert un arrêt complet de l’activité et la mise au repos de l’os. Des semelles avec amorti ou une botte de marche sont souvent préconisés.
Une autre condition peut faire faussement penser à une périostite : c’est le syndrome des loges. Il est dû à une ischémie musculaire (manque d’oxygène dans le muscle) provoquée par une augmentation anormale de pression dans une loge anatomique. Le recours est bien souvent chirurgical (il faut enlever l’excès de pression pour que tout revienne à la normale).
Fort heureusement pour l’athlète, le plus souvent, les périostites se limitent à des tendinopathies qui peuvent se soigner efficacement par une intervention kinésiologique (que nous détaillerons plus loin). Les deux muscles les plus fréquemment concernés sont :
Le tibial antérieur, dont l’action est de faire une dorsiflexion du pied (ramener le pied vers soi) et l’inversion (lorsque le pied tourne vers l’intérieur). Un surmenage du tibial antérieur peut survenir lors de course en descente ou lorsque le coureur attaque le sol trop sur le bout du pied. Le muscle absorbe l’impact alors qu’il est étiré (on parle de contraction excentrique). Il a un rôle freinateur, causant des micro-déchirures qui, à la longue, le traumatisent.
Le tibial postérieur, principal muscle releveur de l’arche interne du pied, ramène le pied en inversion lorsque le pied part en pronation lors de la phase d’amortissement à la marche ou à la course. Il participe également au mouvement de flexion plantaire (mise sur pointes de pied) en synergie avec les mollets. Un pied plat, un valgus de l’arrière-pied (talon rentré vers l’intérieur) ou au contraire un varus de l’arrière-pied (talon tourné vers l’extérieur) entraînant une hyperpronation compensatrice, résultent en une sur-sollicitation du tibial postérieur puisque celui-ci essaie de contrôler la pronation excessive sans toutefois y parvenir.
Comment traiter la périostite tibiale ?
La périostite tibiale est une pathologie handicapante et souvent récidivante. Elle doit être prise en charge à un stade précoce pour éviter les complications. Les coureurs qui ont déjà eu des épisodes de périostites doivent être attentifs aux signaux de douleur dans cette région car c’est leur ‘baromètre’. Si la douleur resurgit, c’est que quelque chose ne fonctionne pas adéquatement : mauvaise technique de course, surentrainement, chaussures inadaptée, troubles statiques... Il faut agir en conséquence pour identifier et corriger les facteurs en cause.
Lorsque la périostite est d’origine musculaire, une rééducation combinant exercices et une adaptation du programme de course est de mise et il faut donc se tourner vers un kinésiologue. Si les douleurs persistent, le patient(e) pourra consulter un médecin du sport ou un podologue pour un diagnostic précis avec eventuellement le port de semelles orthopédiques afin de modifier le travail musculaire pendant les phases dynamiques.
Nombre d’athlètes qui me consultent pour une périostite n’en sont pas à leur premier épisode de la pathologie. La douleur devient un facteur limitant dans leur entraînement. C’est typiquement le cas d’un coureur ou triathlète qui souhaite augmenter ses distances pour passer du 10km au marathon, ou à un triathlon longue distance.
Il est rare que je suggère un arrêt complet de l’activité. Quelques jours de repos sont parfois nécessaires mais la stratégie est plutôt de modifier drastiquement le plan d’entraînement et de réduire le volume, en le couplant à des exercices et de la thérapie sportive. Cette approche fonctionne bien. Selon la gravité de la blessure, d’excellents résultats sont observés dans les quatre semaines qui suivent la première consultation. Un suivi périodique est nécessaire et la poursuite des exercices et des éducatifs de course (souvent délaissés une fois que la douleur disparaît) est primordial car les patrons moteurs qui ont causé la blessure doivent être corrigés sur le long terme.